mardi 14 juin 2011

Le Chat Rivari et le Musée des Fées




L’histoire que je vais vous conter est vraie, c’est mon chat qui me l’a racontée et mon chat dit toujours la vérité !
Mon chat s’appelle Rivari, et quand le Musée des Fées est apparu dans notre village, il était en train de se prélasser au soleil. Il sentait les rayons lui caresser doucement les moustaches, et une légère brise passait devant son nez en chuchotant.
-Le Musée arrive, disait la brise. Le Musée arrive !
Et le Musée apparut.
Le Musée des Fées est un endroit magique. C’est là que sont exposés tous les objets extraordinaires que les fées rassemblent depuis des siècles : épées enchantées, miroirs vivants, capes d’invisibilité, anneaux magiques, bottes de sept lieues, gants de fumée…
Il existe des salles consacrées à chacune des fées les plus célèbres : on peut ainsi admirer la baguette de la Marraine de Cendrillon, ainsi que la fameuse citrouille et même les pantoufles de verre ! Dans une autre salle, le visiteur pourra découvrir la marmite de Carabosse ou bien la baignoire de Mélusine.
Toute une aile du musée est réservée aux plantes et potions merveilleuses.
Et enfin, pour le plus grand bonheur des enfants et des âmes pures, une grande partie du bâtiment est occupé par le Zoo Fantastique, où sont rassemblés les animaux et bêtes légendaires : licornes, griffons, chats noirs, renards, serpents à plumes, on y trouve aussi le Minotaure, le Phoenix, Pégase, le Wolpertinger et même Long Wang, le roi-dragon gigantesque !
Le Musée des Fées apparaît et disparaît au gré du vent, des saisons, des migrations des oiseaux ou bien d’autre chose qu’on ne connaît pas. Il peut se trouver demain au bas de votre rue, et le lendemain à l’autre bout du monde. Si jamais vous tombez dessus, profitez de la visite qui s’offre à vous car vous n’aurez sans doute plus jamais l’occasion de voir de telles merveilles !
Mon chat Rivari, lui, ne s’est pas fait prier. Curieux comme tous les chats le sont, il gravit lestement les marches en marbre blanc et franchit la large porte en améthyste du Musée. Il y passa l’après-midi, et il termina par la visite du Zoo Fantastique. Et là, il vit le poisson rouge !
Il ne s’agissait bien évidemment pas d’un poisson rouge ordinaire, mais du Poisson Originel, qui était né il y a 13,7 milliards d’années en même temps que le Big Bang. Depuis, il vivait une retraite bien méritée dans un bocal exposé au Musée des Fées.
Rivari le trouva à son goût et n’en fit qu’une bouchée.
Aussitôt, il ne se passa rien.
Mais au bout d’une minute et demie, il y eut un « Pop », et mon chat se mit à grossir d’un coup et devint tout rouge !
La gardienne du Musée, Milinette la Garde-Fée, remarqua qu’il se passait quelque chose d’anormal dans le Zoo. En voyant le gros chat tout rouge, elle comprit tout.
-Aïe aïe aïe ! se dit-elle. Si on découvre ça au Pays des Fées, je suis dans de beaux draps !

Elle alla vite acheter un autre poisson rouge, lui colla une baguette magique sur la nageoire pour faire croire que c’était bien un poisson merveilleux et le mit dans le bocal à la place du Poisson Originel.
-Bon, je suis tranquille quelques heures avant que l’on ne découvre la supercherie. Mais il faut que je récupère le vrai Poisson !!
Elle se mit alors à la recherche du gros chat rouge, qui ne pouvait pas être bien loin. Elle le trouva en effet occupé à faire sa toilette dans la salle des Trophées Mythologiques, entre la pomme de Discorde et le casque d’Hadès.
-Eh toi ! lança-t-elle à l’adresse du matou trop gourmand. Rends-moi le Poisson Originel !
Rivari leva la tête et considéra Milinette avec méfiance.
-Miaou, voulut-il dire.
Mais ce qui sortit de sa bouche, à son grand étonnement, ressemblait plutôt à :
-Comment veux-tu que je te le rende, puisque je l’ai mangé ? Il doit être mort…
La Fée trépigna.
-Ecoute, espèce de chat pardeur, je n’ai pas le temps d’entrer dans les détails, mais ce poisson ne peut pas mourir ! Tel que je le connais, il doit être en train de se prélasser dans ton estomac en ricanant du bon tour qu’il me joue !
Rivari écouta son estomac, et il crut effectivement entendre une sorte de ricanement.
-Les poissons ne ricanent pas, dit-il quand même.
-Celui-ci peut le faire, et il le fait même très bien ! Et puis regarde-toi, tu mesures plus de deux mètres, tu es tout rouge et tu parles !!
-Simple intoxication alimentaire… Ton poisson n’était sans doute pas très frais !
-Pas frais mon poisson ?
Milinette en avait plus qu’assez de discuter avec un chat ensorcelé qui ne comprenait rien à rien. Elle sortit sa baguette magique et la pointa sur Rivari en prononçant une formule compliquée.
-Oups, se dit mon chat. Il est temps pour moi de repartir…
La Garde-Fée tenta de le pétrifier, mais Rivari esquiva et se mit à détaler à travers les couloirs du Musée.
Il franchit la grande porte comme un courant d’air et parcourut une dizaine de rues sans se retourner avant de s’arrêter. Il regarda autour de lui, mais ne reconnut pas l’endroit. Le Musée avait quitté notre village.
-Nous sommes à Rhapsody !
Rivari se retourna et se retrouva nez à nez avec Milinette.
-Je suis la gardienne du Musée et tu ne peux pas m’échapper !
Cette fois elle ne lui laissa pas le temps de déguerpir et l’immobilisa d’un sortilège bien placé.
-Que vas-tu faire de moi ? demanda  mon chat tout tremblant.
-Je vais récupérer mon Poisson ! Je connais quelqu’un dans cette ville qui pourra m’aider…
Un nouveau coup de baguette magique, et les voilà transportés dans les coulisses d’un vieux théâtre.

Un homme portant une cape et un chapeau noir les dévisage en souriant.
-Bonjour, Milinette ! Quel drôle de chat m’amènes-tu là ?
-Bonjour, Bracada ! Je vais avoir besoin de tes talents !
Bracada est le plus grand magicien de Rhapsody, la ville des magiciens. Milinette lui raconta tout et implora son aide. Bracada aimait bien les fées, aussi ne se fit-il pas prier bien longtemps.
-Mets donc ton chat dans cette boîte-là, et profite du spectacle !
Rivari fut allongé dans une caisse colorée d’où ne dépassaient que sa tête à un bout, et sa queue à l’autre. Bracada, une scie à la main, commença à couper la caisse en deux. Si Rivari n’avait pas été paralysé par le sort de Milinette, il l’aurait été par la frayeur qui le recouvrit de la tête aux pattes.
Bientôt, la boîte fut découpée en deux parties bien distinctes que le magicien éloigna l’une de l’autre. Et là, nageant dans l’air comme s’il était dans son bocal, se tenait le Poisson Originel.
-Vous pouvez applaudir ! dit-il.
Et Milinette applaudit à tout rompre !
Bracada recolla les deux morceaux ensemble, et quand il ouvrit la boîte, mon chat en sauta comme un beau diable. Milinette, qui n’était pas une fée rancunière comme certaines peuvent l’être, le renvoya chez nous d’un coup de baguette magique. Elle remercia Bracada, et retourna au Musée où le Poisson reprit sa place en soupirant, et où vous pouvez aller toujours l’admirer si l’occasion se présente.
Quant à Rivari, il ne mangea plus jamais de poisson.

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