A mesure
que nous nous enfoncions dans la forêt des Horreurs, l’obscurité devenait plus
dense, l’air plus lourd, et Gilbérald, mon fidèle écuyer, plus bleu. Le lieu
offrait une ambiance des plus macabres, qui empoisonnait notre imagination et
entamait notre raison. Les chevaux étaient nerveux, et nous avions toutes les
peines du monde à les faire avancer. Ils tressaillaient au moindre son, au
moindre souffle dans les buissons. Le mien fut le premier à succomber, des
suites d’une crise cardiaque provoquée par le bruit malencontreux d’une
brindille qu’il brisa lui-même sous son sabot. Quant à celui de Gilbérald, mon
fidèle écuyer, la tension qui se dégageait de la forêt le rendit fou. C’est du
moins ce qu’il nous parut quand nous le vîmes subitement grimper dans un arbre
et se jeter de la plus haute branche en agitant désespérément les pattes. Il
réussit même à lancer quelques petits gazouillis avant de lamentablement
s’écraser par terre.
Nous
fûmes donc obligés de continuer notre route à pied, nous frayant tant bien que
mal un passage à travers l’enchevêtrement de branchages qui encombrait le chemin.
Le bruit de nos pas, étouffé par le lit de feuilles mortes qui tapissait
l’humus, rendait le silence d’autant plus oppressant.
-Je
commence à me demander si j’ai bien fait de vous accompagner, me dit Roger, que
le son de sa propre voix fit sursauter.
-Ne
t’inquiète pas, le calmai-je. Tant que tu restes à mes côtés, il ne peut rien
t’arriver.
Il jeta
un bref coup d’œil à Gilbérald, mon fidèle écuyer.
-Je vois
ça. Mais nous sommes en plein milieu du domaine du cyclope Inette, et s’il
venait à attaquer…
-Tu t’en
fais donc pour si peu ? Je suis un chevalier, ne l’oublie pas, et en tant
que tel, j’ai suivi un entraînement spécial ! Je me rappelle comme si
c’était hier du cours que notre maître d’armes nous fit à propos des combats
contre les cyclopes. Il est très important par exemple de toujours l’affronter
avec le soleil dans notre dos, car leur unique œil est très sensible à la
lumière.
Roger
regarda autour de nous. L’obscurité était plus épaisse que jamais.
-Oui,
bon, fis-je. Il y a encore tout un tas de manières de prendre l’avantage sur un
cyclope. Et puis, au besoin, nous pourrons toujours lui laisser Gilbérald, mon
fidèle écuyer, pour faire diversion.
-Ca,
c’est un bon plan, monseigneur ! En plus, j’ai entendu dire que le cyclope
Inette aimait la viande bien bleue. Votre écuyer est juste à point.
Je me
mis à scruter les arbres attentivement, car il me semblait entendre un
grondement sourd et régulier.
-Méfions-nous,
chuchotai-je. Les cyclopes sont très sournois, et ne connaissent rien des
règles de chevalerie et des bonnes manières au combat. Il n’hésiterait pas, je suis sûr, à nous
tendre un piège, à nous attaquer par derrière, ou pire, à profiter lâchement de
notre sommeil pour nous égorger. Car dis-toi bien que c’est très lâche, un
cyclope !
A peine
avais-je achevé ma phrase que nous vîmes, étendu de tout son long au beau
milieu de la route, un énorme cyclope endormi, dont le ronflement m’avait
alerté quelques minutes auparavant.
-C’est
sûrement lui ! fit Roger en pâlissant.
-Alors
laisse-moi faire, mon ami. Il est temps pour moi de voir si les heures passées
en cours n’ont pas été perdues en vain. Je vais te le terrasser, moi, ce
cyclope !
-Soyez
prudent, tout de même, monseigneur.
-Calme
tes craintes, mon bon Roger, mais parle moins fort quand même.
Je
m’approchai silencieusement du monstre, et je me hissai jusqu’à sa tête. Son
haleine fétide faillit presque me faire défaillir. Mais je restai bien ferme
sur mes assises, et prenant mon épée à deux mains, je lui tranchai la gorge
d’un geste net et précis. Le cyclope ouvrit l’œil, me considéra un instant avec
une surprise qui se transforma en stupeur à la vue de son sang qui lui sortait
de la gorge à gros bouillons. Ce fut plus qu’il n’en put supporter, et il
expira dans un gargouillis à peine audible. Voilà comment fut terrassé le plus
terrible monstre des environs, le cyclope Inette, qui plus jamais ne
terroriserait personne.
-Alors
là bravo, monseigneur ! s’écria Roger. Vous vous êtes bien battu !
C’était très impressionnant !
-Bah,
fis-je. Le combat auquel tu viens d’assister n’est que futilité, pour nous
autres chevaliers. « Défends la veuve, sauve l’orphelin, mange ta soupe et
dis bonjour à la dame », telle est notre devise.
Mais
l’heure n’était pas aux congratulations, car tout portait à croire que le
poison qui rongeait mon pauvre Gilbérald, mon fidèle écuyer, arrivait à terme.
-Il n’a
plus beaucoup de temps à vivre, me confia Roger, l’air visiblement peiné. C’est
bien dommage. Mais s’apitoyer sur le sort des morts et ressasser le passé ne
sert à rien. La vie continue, et si vous avez besoin d’un écuyer, soyez sûr,
monseigneur, que je remplirai ce rôle avec joie.
-Brave
homme ! fis-je, au bord de l’émotion.
Deux heures
plus tard, au prix d’incroyables efforts, nous étions arrivés à l’orée de la
forêt des Horreurs, qui était également celle de la forêt des Maléfices. Mais
là encore, une épreuve nous attendait. Un grand chevalier en armure noire se
tenait au beau milieu du chemin, les mains fermement posées sur le pommeau de
son épée solidement fichée dans le sol.
-Holà,
messires ! nous lança-t-il. Un instant !
-Nous
n’avons rien à déclarer, dis-je. Laisse-nous passer !
-Si vous
voulez continuer votre route, il vous faudra me payer le droit de passage.
Sinon, vous n’avez plus qu’à rebrousser chemin.
-Je suis
en mission spéciale, sur ordre du Roi. Tu dois me laisser passer !
-Si tu
veux passer sans payer, chevalier, je respecterai ton choix sans te poser plus
de questions. Mais alors il te faudra me combattre.
Il leva
son épée, et après l’avoir fait tournoyer au dessus de sa tête, il la tendit
vers moi, pointe en avant.
-Combien
je vous dois ? demandai-je en sortant mon porte-monnaie.
-Cinq
mille écus !
-C’est
une honte ! m’écriai-je. Rançonner ainsi les honnêtes gens !
Il me
menaça de son épée.
-On ne
pourrait pas marchander un peu ? hasardai-je.
-Pas
question ! Je ne suis pas un vulgaire marchand de tapis ! Bats-toi,
si tu n’as pas assez d’argent !
-Allons,
allons, ne nous énervons pas.
-Allez !
me cria-t-il. Viens te battre, si t’es un homme !
-La
violence n’a jamais rien réglé, vous savez !
-Tu as
peur ! Tu es un lâche ! Ouh, le lâche !
Cette
fois, c’en était trop ! Dieu m’est témoin que j’avais tout fait pour
éviter d’en arriver là, mais il ne ma laissait pas le choix. Il me fallait
faire demi-tour.
-Allez-y !me
lança Roger. Montrez-lui qui vous êtes !
-C’est
que…
-C’est
ça ! cria le chevalier noir. Montre-moi qui tu es !
Il
brandissait son épée en sautillant comme un fou, le regard dément, complètement
possédé par le démon de la bataille. Il s’approcha de moi et me donna un coup
de pied dans le tibia.
-Aïe !
Ca va pas la tête !
-Bien
fait ! Ah ah ah. Ta mère en short devant le donjon !
Malgré
moi, je sortis mon épée de son fourreau, et je me préparai au combat. Voyant
cela, le chevalier noir sembla hésiter.
-Ah !
fit-il. Euh… vous avez l’intention de vous battre ?
-Puisqu’il
le faut !
-Ah
bon ! Alors je me rends, vous avez gagné. Bravo ! Vous avez été le
plus fort, je ne faisais pas le poids. C’était un beau combat, vraiment !
Roger
était au comble de l’étonnement.
-Mais,
dit-il, vous n’avez même pas commencé !
-Tais-toi,
lui dis-je. Tu n’y connais rien. Puisqu’il dit que je suis le plus fort !
Le
chevalier noir se rangea sur le côté, et s’inclinant, nous invita à poursuivre
notre route.
Une fois
de plus, je sortais victorieux d’un combat durement mené. Forts de cette
nouvelle victoire, nous étions à présent dans la forêt des Maléfices, où vivait
la vieille sorcière qui elle seule pouvait sauver Gilbérald, mon fidèle écuyer.
Mais allions-nous la trouver à temps, ou allait-il mourir stupidement dès le
début de l’histoire ?
* * * * * * * * *
Les
heures s’écoulaient inexorablement, et nous n’avions encore trouvé aucun indice
pouvant nous renseigner sur la présence d’une éventuelle sorcière. Je
commençais à sérieusement douter de son existence. Je regardai tristement
Gilbérald, mon fidèle écuyer, puis je me tournai vers Roger, et je me dis qu’il
ferait assurément un très bon écuyer.
-Tu es
sûr que c’est par là ?
-Ben
non, pas vraiment, dit-il. Vous savez, monseigneur, la forêt est vaste, et je
n’y suis pas venu très souvent. J’ai bien peur que nous n’arrivions trop tard.
Gilbérald,
mon fidèle écuyer, commençait à délirer. Il se prenait tour à tour pour un
écureuil et une noisette, et il se mordait régulièrement le bras à pleines
dents en poussant des petits squick squick.
-On n’a
pas idée, non plus ! grognai-je, agacé. Est-ce que je me fais transpercer
l’épaule par une flèche empoisonnée, moi !?
Le
silence de la forêt fut alors déchiré par un formidable craquement. Un arbre
venait de s’abattre bruyamment non loin de nous.
-Tiens,
fis-je. Il y a donc des bûcherons qui travaillent dans cette forêt ?
-Ne
trouvez-vous pas que le bruit se rapproche dangereusement, monseigneur ?
me fit remarquer Roger.
Sa
phrase se transforma en cri apeuré quand deux arbres gigantesques s’abattirent
sur nous. Nous fûmes ensevelis sous leurs ramures entremêlées.
-Ah
ça !m’écriai-je en tentant de m’extirper de cette prison inattendue. Qui
donc s’amuse à nous faire tomber des arbres sur la tête ?
Je crus
alors apercevoir, glissant prestement entre les arbres, la silhouette gracieuse
d’une jeune fille à la peau brune, dont les yeux me lancèrent un éclair aussi
bref qu’inquiétant. Ce ne fut que le temps d’un battement de cil, et
j’attribuai cette vision au choc que je venais de subir. Par contre, le cyclope
qui se tenait devant moi, vigoureusement campé sur les deux piliers qui lui tenaient
lieu de jambes, était bien réel. La grossière massue avec laquelle il tenta de
m’écraser aussi, mais il ne réussit qu’à réduire quelques branches en petit
bois, et je m’en allai promptement rejoindre Roger sous les feuillages, abris
désespéré et bien dérisoire face aux assauts furieux du monstre.
-Ca
alors ! murmurai-je. On aurait dit le cyclope Inette. Mais c’est
impossible, je l’ai tué !
-C’est
son esprit qui revient pour se venger, grelotta Roger.
-Squick
squick, se mordit Gilbérald, mon fidèle écuyer.
Le
cyclope souleva le tronc qui nous abritait comme il l’aurait fait d’un fétu de
paille et l’envoya par dessus les cimes. Nous l’entendîmes chuter
lourdement dans un craquement sinistre à plusieurs dizaines de mètres de là. Le colosse nous dévisagea de
son œil unique, et un horrible rictus déforma son visage pourtant fort laid au
naturel. Roger se jeta à ses pieds, les mains tendues en avant dans une ultime
supplique.
-Epargnez-moi,
monsieur l’esprit du cyclope Inette ! se lamenta-t-il. Ce n’est pas moi
qui aie eu l’idée de vous tuer ! C’est lui ! A vrai dire, j’étais
même plutôt contre.
Roger
essayait de gagner du temps, et je ne pus que saluer son courage. Mais le
cyclope, semblant prêter foi à ses dires, se tourna vers moi. Son haleine
méphitique me convainquit qu’il ne s’agissait pas là d’un fantôme.
-Ne
t’inquiète pas, mon bon Roger, dis-je. Ce n’est pas un fantôme, c’est un vrai
cyclope.
Et la
vérité m’apparut dans toute son indécente nudité : c’était le frère jumeau
d’Inette qui se tenait là devant moi, frère caché au monde jusqu’à présent,
sans doute pour d’obscures raisons d’héritage. Le monstre leva son énorme
massue, et je sentis que ma dernière heure était venue. J’allais bientôt
comparaître devant le créateur de toutes choses, la tête basse et passablement
écrabouillée, sans avoir pu mener à bien la mission pour laquelle il m’avait
investi. L’arme s’abattit sur moi avec toute la force et la sauvagerie dont
était capable un tel monstre.
Mais la
masse stoppa net à quelques centimètres de mon front. Ouvrant les yeux, je
constatai non sans surprise qu’elle avait été arrêtée par un jeune garçon. Sa
force semblait toutefois surhumaine puisqu’un seul bras lui avait suffit pour
réaliser cet exploit.
Il
arracha alors la massue des mains du cyclope et la brisa en deux. Tout d’abord
effaré, le monstre s’apprêtait à réagir, mais le garçon ne lui en laissa pas le
temps: d’un seul coup de pied, il l’envoya dans les cieux, où il ne fut bientôt
plus qu’un point minuscule, puis il disparut pour toujours. Ainsi finit le frère
jumeau caché du cyclope Inette.
Le jeune
garçon se tourna vers moi, un grand sourire se dessinant sur ses lèvres:
-Je vous
prie de m’excuser, chevalier; dit-il. Je me suis interposé dans votre combat
sans votre permission.
-Tu es
jeune,
mon fier et impétueux ami, mais je l’ai été avant toi. Je ne t’en tiendrai donc pas rigueur. Sache
cependant, comme l’expérience me l’a moi-même appris
plus d’une fois, que la
limite entre audace et inconscience est vite franchie. Si tu avais bien observé
mon combat contre ce cyclope, tu aurais noté que j’avais la situation bien en main, et il
s’en est fallu d’un cheveu que tu ne sois pris dans la violence de ma
contre-attaque! Fort heureusement, je me suis retenu à temps, mais cela aurait
pu t’être fatal!
-Je
n’avais pas remarqué, en effet! Pardonnez ma folie!
-Que
cela te serve de leçon! Ceci dit, ta technique me semble assez intéressante.
D’où te vient cette force?
Sa
figure s’illumina. Ses cheveux en mèches folles lui retombaient sur les yeux
malgré le bandeau qui les ceignait. Il avait l’air honnête et loyal, mais on
avait déjà vu des loups se déguiser en agneau pour mieux rentrer dans la
bergerie, et je restais discrètement sur mes gardes.
-Ne
soyez pas si tendu, chevalier, et rangez cette épée que vous brandissez vers
moi. Je ne vous veux aucun mal, m’assura-t-il. Et je ne pense pas que les
rudiments d’arts martiaux dont vous venez de voir une brève démonstration
puissent grand chose contre votre expérience du combat!
-Armarcio?
Quel nom étrange! Est-ce une sorte de sortilège? Qui te l’a appris?
-Mon nom
est Yam, je viens des montagnes de Pardela. Mon père m’a enseigné tout ce qu’il
savait, et lui même tenait cela de son père, qui le tenait de son père, qui
pour sa part le tenait de son arrière grand tante, qui avait tout appris d’un
vieil ermite dont la science lui venait d’un raton-laveur qui avait été enlevé
dans sa jeunesse par des extra-terrestres, mais je ne peux garantir
l’authenticité de ce dernier point.
Il
sembla alors remarquer la présence de Gilbérald, mon fidèle écuyer.
-Qu’est-il
donc arrivé à cet homme?
-Ah oui,
je l’avais oublié! Il nous faut absolument trouver la vieille sorcière
qui est censée habiter cette forêt, sans quoi il
mourra!
Yam
s’approcha de Gilbérald, mon fidèle écuyer, et resta plusieurs secondes à le
dévisager.
-Ton
père t’a sans doute appris tes armarcios, mais il ne semble pas t’avoir appris
la politesse; jeune homme! Ca ne se fait pas, de fixer quelqu’un avec autant
d’insistance, simplement parce qu’il a un physique ingrat!
-Non,
non, ne vous méprenez pas! Cet homme me rappelle quelqu’un, un ami de mon père.
Je ne me souviens pas bien, j’étais très jeune la dernière fois que je l‘ai vu,
mais je crois bien que c’est lui. Il avait l’habitude de venir nous voir au
moins une fois par mois, et ils discutaient longuement ensemble.
-Ce
serait un ami de ton père?! Après tout, c’est bien possible! Il ne m’a jamais
parlé de ce qu’il avait fait avant d’entrer à mon service. Si j’avais su qu’il
me causerait autant de soucis, je ne l’aurais d’ailleurs jamais engagé! Mais
que fait ton père à présent?
Le jeune
garçon baissa les yeux.
-Il est
mort voilà bientôt deux ans...
J’avais,
contre mon habitude, commis un impair que je m’empressai de réparer.
-Ah ah!
fis-je.
-Il a
été assassiné, et son meurtrier a enlevé ma mère. C’est pourquoi j’ai passé ces
deux dernières années à parcourir le monde. Je n’aurais de cesse de retrouver
l’assassin de mon père et de libérer ma mère de son odieuse emprise!
-C’est
bien, mon garçon, d’avoir un but dans la vie! lui dis-je la main sur l’épaule.
Gilbérald,
mon fidèle écuyer, qui était revenu à lui, se mit alors à crier:
-Toréador,
prends garde à toi!
Yam
s’approcha de lui promptement.
-Saurait-il
quelque chose sur le meurtrier de mon père? C’était son ami, il m’a reconnu lui
aussi malgré ses sens perturbés et il tente sûrement de me donner un indice!
-Moi,
dit Roger, je crois surtout qu’il rentre dans une nouvelle phase de délire.
C’est très fréquent chez les victimes de ce poison. Avec mes anciens
compagnons, nous avions d’ailleurs appelé cette nouvelle phase de délire la
« Nouvelle phase de délire ».
-Toréador!
Toréador! criait Gilbérald, mon fidèle écuyer.
-Non!
Non! Ce doit être le nom du meurtrier! Il essaie de m’aider malgré la fièvre
qui le secoue!
Un feu
intense brûlait dans les yeux du jeune homme.
-Ah mon
père! Pour la première fois depuis ce jour funeste, j’entrevois une lueur
d’espoir! Tu seras vengé, je te le jure à nouveau! Quant à toi, Toréador,
prends garde à toi, oui, prends garde à toi! Le bras de la vengeance est en
marche!
-Allons,
mon garçon, dis-je. Du calme! Et n’oublie pas que le bras de la vengeance est
un plat qui se mange froid.
Sans se soucier de mon appel à la
retenue sans laquelle toute action est pourtant vouée à l’échec, il
prit Gilbérald, mon fidèle écuyer, dans ses bras, et sans même plier sous son
poids il commença à avancer à vive allure, tout en m’exhortant à le suivre
-Venez,
chevalier! Je connais le refuge de la sorcière! C’est la vieille Serpillière,
j’ai déjà eu affaire à elle. Elle n’est pas des plus accueillante, mais elle
connaît son affaire. Nous sauverons votre écuyer!
Il
quitta le chemin pour s’enfoncer dans la forêt. Son histoire ne m’avait pas
paru très convaincante, mais nous n’avions d’autre choix que de lui faire
confiance. Et les paroles de Merlan me revinrent à l’esprit: « tu aurais
tort de ne compter que sur toi-même si tu veux aller au bout de ton
périple ». Je m’en remis donc à la sagesse de l’enchanteur, et suivi de
Roger, je m’enfonçai à mon tour dans les profondeurs de la forêt...
* * * * * * * *
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